Quelques poèmes
.
CHANT DE PERTE
.
1.
.
Une ombre passe
diaphane dans la nuit
elle danse
rêvante
.
le vent obscur me souffle
une voix étrange
dont je ne perçois pas les mots
.
retentit
seule
sa mélodie
qui me porte
m’ennocturne enfin
.
elle se tait
son silence résonne
.
j’entends au loin comme un crépitement sourd
je sens sur mon visage le sable qui tourbillonne
et s’agglomère étrangement en pierre
pour donner
presque invisible
une forme
une ombre
.
un masque
.
un rêve
.
ton souffle retentit calmement
tu te tais
tu écoutes avec moi
le bruissement de la cendre
autour de l’ombre
.
le masque tombe
.
le rêve se lève
.
une ombre passe
tu frémis
tandis que mon cœur de glace
d’angoisse
gémit
.
l’ombre disparaît
en un frottement obscur
tu n’es plus là
et je
sombre
.
2.
.
A nos pieds
le sable
épars
comme nos mémoires
sait ce que que nous avons oublié
.
dans la nuit
scintillante
le vent obscur l’emporte
ce vent obscur
fils du vide
que nous ne voyons pas
et qui pourtant
rythme nos nuits
.
alors l’oubli a triomphé
ne reste plus que la calme obscurité
que je contemple
noire
les yeux ouverts
.
enfin
je dérive
je ne sais plus
ce que je dis
.
3.
.
Soudain
un regard étrange
plein d’une lumière obscure
crépite
.
l’oubli silencieux
bruisse
se répand
.
un bruit lointain
quelque animal inconnu
invisible
mobile pourtant
inquiétant
retentit
.
mais l’ombre proteste
et tout se tait
.
4.
.
Ton sourire que je pressens
ombre ton regard
si absent
.
le sable
de retour
tourbillonnant
drape d’opacité
ton visage invisible
.
ne reste rien
et un froid terrible
comme la glace
enserre nos cœurs
.
moi qui suis sans cœur
je constate tes larmes
le ciel s’est entrouvert au-dessus de ton œil
et a vu l’eau noire
à nos pieds
engloutir ces gouttes
.
5.
.
Dans l’obscurité
un bruit m’effraie
et mon cœur de glace
tremble
.
ton silence obscur
surgit
m’aide à écouter
ce que je n’entends pas
m’aide à entendre donc
le meurtre onirique dont
je suis l’acteur
.
et le vide qui s’ouvre
alors
libérateur
.
6.
.
Dans l’obscurité où scintillent des points gris
un être indéterminé
déambule
.
son doux visage
rêveur
sourit calmement
.
je le regarde et
mon cœur de glace
frémit
.
sur une pierre grise et lisse
gît silencieusement
sous le glaive brisé
le sable
prêt à devenir pierre
ombre
.
masque
.
rêve
.
le regard incandescent
tu fais un geste de la main
tranquille et
énigmatique
.
une étrange clameur
gronde dans l’eau sombre
.
une larme coule
sur ta joue sombrement écarlate
.
les flots s’ouvrent
une forme
scintillante
apparaît
se mêle follement
à l’ombre dansante
.
l’être maintenant
étrange
s’avance vers la pierre grise et lisse
se presse vers le sable
le prend dans ses mains
l’enfonce dans sa poitrine
le mélange à son cœur
qui se met à brûler d’un feu bleu
.
bleu comme tes yeux
tandis que tu me parles
un langage inconnu
car tu parles tu parles
tu dis des mots obscurs
des mots que je ne comprends pas
mais que j’écoute
et qui résonnent étrangement
dans l’obscurité autour de moi
.
moi qui suis sans cœur
je pleure
car je te perds
oui je te perds
et je sombre
enfin
moi qui dis je
je ne suis
plus là
non plus
Dimitri Lorrain
Strasbourg, 2020